Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Spoutnik
Spoutnik
Publicité
Spoutnik
Archives
21 janvier 2005

Assureurs = voleurs ?

On entend souvent et partout « les assureurs sont tous des voleurs » !  Moi je dis « cela reste à voir ». Car ce n'est pas que je ne suis pas d’accord avec ça, c’est seulement qu’il faut savoir de quoi on parle. Voleurs oui, mais  pas toujours. Voilà la différence. Des fois même, les assureurs sont des voleurs "humains", qui ne vont pas hésiter à oublier leurs sacro-saintes clauses des contrats, au nom d’un sincère et réel sentiment de compassion. Bon, il faut quand même préciser que la compassion et la sincérité chez les assureurs, ça ne leur vient pas naturellement. Le plus souvent ça ne leur vient qu’avec avec un gros coup de pied dans le cul.

Prenez par exemple un tsunami de belle facture dans l’Asie du Sud Est. Qui fait pas moins de 220.000 morts. Une catastrophe pour les assureurs de tous les pays. Une catastrophe surtout pour les réassureurs d’ailleurs. Les réassureurs ? Vous savez ces grosses compagnies que l’on ne connaît pas trop, chez qui les montants sont toujours astronomiques et qui possèdent généralement un « Re » à la fin de leur nom, histoire de savoir à qui on a affaire : Munich Re, Swiss Re, Hannover Re…. et toutes les « bermudiennes », seule la SCOR, notre belle compagnie de réassurance française, toujours présidée par le très sémillant Denis Kess semble échapper au suffixe Re (faut dire que vu le trou dans lequel elle se trouve, mieux vaut ne pas la ramener ...).

En tout cas, ces « Re », frileuses comme pas deux, sont toujours super discrètes sur les montants des factures qu’elles ont à acquitter, surtout en de pareils circonstances. Normal, on ne raconte pas sa vie dans la réassurance. On est délicat et bien élevé. C’est feutré la réassurance. Vous imaginez, vous, raconter que vous êtes dans la merde jusqu’au cou car vous aller devoir rembourser 100 millions de dollars ? Non cela ça le fait pas. Vous auriez envie vous d’aller signer une convention de réassurance avec un réassureur super exposé (traduction « super dans la merde ») dans la réassurance « catastrophe » après un truc comme cela ? Moi non. J’aurais trop peur qu’il soit incapable de faire face à ses obligations le coup suivant.

Tout de même, pour ce Tsunami, on parle de 10 milliards de dollars qui seront à la charge des assureurs. Ca fait déjà une somme rondelette 10 milliards de dollars. Que l’on ne trouve pas tous les matins sous les sabots d’un cheval. Et encore, 10 milliards de dollars, c’est visiblement « sous évalué », du moins c’est ce qui se dit du côté du Lloyd’s de Londres. De toute manière, à la fin, personne ne fera des additions sur ce qui aura été vraiment remboursé. Encore une fois, on ne raconte pas sa vie dans ce milieu et c’est tant mieux comme cela.

Si comme toujours la question du coût final se pose encore, il faut savoir que les Assureurs de personnes de nos petites contrées sont également exposés (traduction « un peu dans la merde »). Pas en dommage (les dégats), non, mais plutôt en « personnes ». C'est-à-dire en « gens ». Car oui, les touristes occidentaux qui meurent, cela coûte cher, très cher, aux Assureurs de personne. Imaginez, ces centaines ou milliers de cadres, avec leurs enfants, super couverts par plein de contrats, (garanties décès individuelles, garanties décès par les employeurs, invalidité, GAV, assurances emprunteur pour l’appartement, assurances scolaires …) disparaissant comme cela pendant leurs vacances … Et bien ça, ça douille un max. Enormément de pognon à sortir et à transmettre aux bénéficiaires (selon la belle « clause type » à savoir « En cas de décès de l’assuré, je désigne comme bénéficiaire mon conjoint, à défaut mes enfants nés ou à naître, vivants ou représentés, par parts égales entre eux, à défaut mes héritiers » celle que les gens signent le plus souvent). C’est le Grand Calvaire des Assureurs quand ils apprennent ce genre de choses à la télé le matin du 26 Décembre. Des sueurs froides leurs viennent immédiatement à ces gentils assureurs. Car il faut bien le dire, quelques centaines ou milliers d’assurés super couverts qui disparaissent, cela suffit à modifier les calculs actuarials en assurance de personne. Et à coup sûr cela change les résultats techniques en fin d’année. C’est du « hors statistiques » ce genre de truc. Mais est ce de l’aléa ?, c’est là toute la question !

En effet, heureusement, l’assureur peut vite retrouver son calme et reprendre confiance. Car soudain il se rappelle un truc super trop chouette. Qui prouve qu’il est trop intelligent. Et cela lui fait toujours super plaisir de voir qu’il fait partie d’une caste d’intelligents. Et ce truc c’est ce qu’on appelle la clause d’exclusion « catastrophe naturelle » qui existe dans la plupart des contrats d’assurance. Ouf ! Heureusement, qu’il y a toujours un type comme moi pour être payé à penser à exclure des trucs des contrats, sinon c’est trop la merde partout. On appelle cela diminuer le périmètre de garantie par l’adjonction d’exclusions. Ici ce sont les raz de marée et les tremblements de terre*, justement. Qui touche l’essentiel des contrats en assurance de personne, qu’ils soient individuels ou collectifs (par les entreprises).

Ben merde alors. Si les tremblements de terre et les raz de marée sont exclus, alors … qu’est ce qu’on a à payer ? Ben rien ! Pourquoi ? Parce que c’est justement … exclu. Donc indemnisations = pas grand-chose. Ouf ! Mais est ce moralement « bien » ? Ben non. Non, évidemment ce n’est  pas « bien », mais c’est techniquement justifié. Mais c’est surtout certain qu’avec un coup comme cela, c’est clair que « assureurs = voleurs » va devenir le slogan à la mode. Alors la FFSA, la très « respectée » Fédération Française des Société d’Assurance (heureuse titulaire du prix Big Brother 2003), qui fut en son temps dirigée par le très sémillant Denis Kessler (à l’époque vice président du MEDEF), avant qu’il ne lui prenne l’étrange lubie de partir combler le trou de la SCOR, a demandé à ses adhérentes (AXA, le GAN, AZUR, AVIVA, AGF, GENERALI, GROUPAMA etc …) de faire preuve de souplesse dans l’interprétation des clauses d’exclusion. Et certaines (je ne dirais pas lesquelles, je ne suis pas là pour leur faire de la pub) ont déjà affirmé qu’elle le feront, ayant même commencé à faire des avances sur les capitaux décès. On verra pour les autres. On verra aussi pour les grosses mutuelles (MACIF, MAAF, MAIF …) dont le silence devient assourdissant.

Alors donc voilà. Quand ils ont peur de recevoir un gros coup de pied dans le cul, les assureurs peuvent pouvoir faire preuve de compassion. Voilà donc au moins une bonne nouvelle. La seule bonne nouvelle que nous a apporté ce tsunami.

Pour le reste, je suis sceptique.




* très rigolo : certains contrats n’excluent que les tremblements de terre et pas les raz de marée. D’autres l’inverse. Question : les victimes du tsunami sont elles victimes d’un raz de marée ou d’un raz de marée consécutif à un tremblement de terre ? A mon avis les tribunaux auront à trancher les litiges dû à l'interprétation. Dans 3 ou 4 ans. Et vu les appels probables, disons que certains contrats ne verront leur réalisation que dans 6 ou 7 ans.



Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité