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24 décembre 2003

Joyeux Noël

Au 24 de la Place de la Madeleine, la maison Fauchon (vénérable depuis 1880), avec ses deux voituriers, présente une façade de château enneigé en stuck. Devant l'entrée, il y a déjà une queue d'une trentaine de clients auxquels on distribue des catalogues pour nourrir leur attente. Ces gens sont hétéroclites, allant du jeune cadre et la vieille dondon. Ils jettent autour d'eux, il me semble, des regards inquiets. Je me demande s'ils ont vraiment la conscience tranquille ! A moins qu'ils soient presés de finir leurs achats. Dans Fauchon, tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté culinaire. Ici, on découpe le saumon fumé en entrecôte de bonne taille, le foie gras en rondins canadiens et le caviar est acheté au kilo. C'est cher et presque beau. Les lumières faites pour être accueillantes. Cela me donne faim et il est 10 heures seulement. Les hôtesses sont en tailleur et les serveurs portent une toque. Fauchon célèbre cette année les recettes et traditions du Poitou-Charente. Je me demande si le plat de résistance sera, cette année, composé de rafarinade salée.

Plus loin la boutique Eres présente en toutes saisons des maillots de bains appétissants. Si un jour des mannequins vivants sont utilisés, il y aura un émeute sur la place. Un groupe de japonaises perdues en profite pour s'essayer à l'accent français en me demandant la direction des Gal-ri-la-fay-ets. Je leur indique le chemin. Elles s'en vont. Je les regarde s'éloigner.

Je traverse la place. La maison Hédiard, toute rayée de rouge et de noir, habite au 21. Un voiturier s'occupe de grosses limousines. La façade est scintillante dans un style clinquant qui m'est désagréable. C'est étrange mais ici, il n'y a pas de queue. Les oranges et les clémentines du petit chariot à l'entrée ont un air tapé. La maison Hédiard fait définitivement grise mine. Le lumière n'y est en rien acceuillante. Partons vite.

Le "centre de cassage de prix" de Sony au 19 fait lui aussi queue dehors. Une trentaine de personnes y attendent d'y entrer pour bénéficier de prix. Le public patient est moins bobo que boban (bourgeois de banlieue). Vu la vitesse d'écoulement, une personne par une personne, ils en ont pour la matinée. Très mauvaise idée d'y aller un 24 Décembre. Ils me regardent étonnés de me voir les regarder. Je continue.

Quelques numéros plus loin, la maison Kaspa, spécialiste du caviar (Paris, Londres, Los Angeles, Bâle), regorge de clients comme autant de grains dans une petite boite ronde. On s'y presse. Le Belouga (fameux) y est à 128 € les 30 grs. et l'Osciete iranien (pas mal déjà) est à 78 € les 30 grs. Je note que le caviar impérial (sic) français (grain de belle taille, gris anthracite, saveur fine) est à 43 € les 30 grs. Je note aussi que le choix de vodkas est intéressant. Le caviar, c'est élégant, cher et absolument inutile. J'ai lu un jour que la révolution ne se fait bien que dans les pays de caviar. "Mange ton caviar camarade et fais la révolution" pourrait-on dire.

Plus loin, la boutique Baccarat semble délaissée. Les vendeuses ont l'air de s'ennuyer ferme avec leurs bulles de verre autour du cou. Les rares clients ont des airs de spectres. Je me dis que "ah, c'est dur le commerce !" en dépassant la devanture décorée moche.

Je traverse le boulevard Malherbes au goût de guillotine, pour arriver au pied de Lucas Carton d'Alain Senderens. Il y aura-t-il un menu gastronomique spécial réveillon ? Je passe devant la Galerie de la Madeleine (un passage désespérant et désespérément vide) puis devant un Odiot (tout pour que votre table soit distinguée) tout aussi vide, un Cerruti bien habillant (qui reste ouvert pendant les travaux) ...

La rue Royale est l'une des plus belles perspectives de Paris. Je m'arrête au milieu pour remarquer, une fois de plus, qu'un axe imaginaire rejoint parfaitement le sommet du fronton de l'Assemblée Nationale au sommet du fronton de l'Eglise de la Madeleine, en passant juste par le haut de l'Obélisque. De la précision d'horloger. Une très belle visée.

Le coin Sud Est de la place n'ayant aucun intérêt, je ne m'y arrête même pas et je continue à tourner.

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